Système d’Échange de quotas d’émission de l’UE (EU ETS/SEQE) : comment les différents rapports en discussion au Parlement européens affecteront le marché du carbone en UE ?
L’UE est en train de revisiter son système d’échange de quotas d’émission (SEQE), un des outils clés pour atteindre ses objectifs de réduction de 55% des émissions de CO2 d’ici 2030 et la neutralité carbone en 2050.
Climact a déjà publié un outil de simulation qui permet d’évaluer l’impact d’un certain nombre de propositions clés sur l’offre et la demande globales, l’évolution de l’excédent, les mises aux enchères et les allocations gratuites des quotas d’émission. Ce modèle a été mis à jour pour :
- Prendre en compte les différents amendements de la proposition de la Commission (en particulier ceux proposés par le rapporteur Pieter Liese et le rapporteur Mohamed Chahim) ;
- Fournir des résultats détaillés sur la mise aux enchères et les allocations gratuites des quotas au niveau des États membres.
Ce modèle mis à jour est disponible en libre accès ci-dessous.
Contexte
En juillet 2021, la Commission européenne a entamé la révision du SEQE pour l’aligner sur l’objectif de réduction de -55% d’ici 2030. Plus tôt cette année, Climact a publié un rapport qui évalue l’impact de cette proposition sur un certain nombre de paramètres clés tels que l’équilibre global entre l’offre et la demande. Le modèle qui a été utilisé pour l’analyse a également été rendu public. Le rapport et le modèle ont été publiés ici (https://climact.com/en/is-the-eu-ets-proposal-fit-for-55/).
Des discussions sont en cours, aussi bien au niveau du Conseil que du Parlement européen, sur la révision proposée. Deux rapports clés sur les amendements sont actuellement débattus au sein du Parlement qui impacteront le fonctionnement du marché du carbone :
- En janvier 2022, Pieter Liese (EPP) – le rapporteur sur la révision du SEQE – a publié un projet de rapport contenant plusieurs amendements à la proposition de la Commission ;
- Quelques semaines plus tôt, Mohammed Chahim (S&D) – le rapporteur d’une proposition législative connexe sur le mécanisme d’ajustement du carbone aux frontières (MACF) – a aussi publié un projet de rapport, avec des amendements qui affecteront également certains aspects du SEQE.
Ces rapports seront discutés et votés au sein de leurs Commissions parlementaires respectives dans les semaines et mois à venir, ce qui constituera une étape clé dans le processus de décision. Afin de continuer à soutenir et à alimenter le débat, Climact a mis à jour son précédent modèle du SEQE, notamment pour prendre en compte les différents changements proposés tant par le rapporteur Liese que par le rapporteur Chahim.
Mise à jour du modèle
La version mise à jour est disponible ici
Les changements importants comparés à la version de janvier 2022 sont :
- Le modèle inclut maintenant 4 scénarios prédéfinis : la proposition de la Commission européenne, le rapport Liese, le rapport Chahim, et un quatrième scénario avec une suppression progressive plus ambitieuse des allocations gratuites. Ce dernier scénario a été développé à la demande, et sur base des contributions, de Carbon Market Watch.
- Le modèle produit désormais des résultats sur les mises aux enchères et les allocations gratuites attendues des quotas d’émissions au niveau des États membres.
- Les chiffres des émissions ont été mis à jour sur base des dernières émissions vérifiées (pour 2021), telles que déclarées au 31 mars 2022.
Conclusion 1 – Aucun des scénarios ne modifierait de manière significative l’offre globale de quotas dans le cadre du SEQE, mais il y aurait des changements importants dans la structure de l’offre.
Suivant le rapport Liese, le principal changement est l’introduction d’un « Fonds océanique », qui recevrait les revenus de 240 millions de quotas pour soutenir l’innovation dans le secteur maritime. Ce fonds océanique serait financé par les mises aux enchères des quotas des États membres. De plus, le Fonds d’innovation augmenterait de 120 millions de quotas par rapport au scénario de la Commission, principalement au détriment du Fonds de modernisation ;
Suivant le rapport Chahim, les quotas nationaux mis aux enchères resteraient inchangés par rapport à la proposition de la Commission. Les allocations gratuites diminueraient considérablement (de 20 %, soit un peu plus d’un milliard de quotas). Les quotas non alloués seraient mis aux enchères au profit du budget de l’UE (714 millions de quotas) et du Fonds d’innovation (+315 millions de quotas par rapport à la proposition de la Commission).
Dans le cas d’une suppression rapide et complète des allocations gratuites (scénario « full free allocation phase out « ), les quotas alloués gratuitement diminueraient de 65 % (soit 3,1 milliards de quotas) sur l’ensemble de la période 2021-2030. Dans ce scénario, les quotas non alloués ont été redistribués entre les quotas nationaux mis aux enchères (+- 2,1 milliards de quotas) et le Fonds d’innovation (+- 1 milliard de quotas).
Conclusion 2 – Le rapport Liese diminuerait significativement le nombre de quota mis aux enchères de la plupart des états membres, avec une réduction globalement plus prononcée pour les états membres à faible revenu.
Globalement, la plupart des États membres verraient une réduction de leur nombre de quotas mis aux enchères par rapport à la proposition initiale de la Commission. La raison sous-jacente est le transfert des quotas mis aux enchères par les États membres vers le Fonds océanique. En moyenne, le nombre de quotas nationaux mis aux enchères seraient réduits de 7 % (pour l’ensemble de la période 2021-2030).
Un deuxième facteur de changement est la redistribution proposée du fonds de modernisation (qui serait basée sur la clé de répartition du fonds de transition juste). Ce deuxième facteur atténue la diminution du nombre de quotas mis aux enchères par les États membres à revenu élevé (qui recevraient désormais aussi une partie du Fonds de modernisation), mais l’amplifie pour les États membres à faible revenu.
Conclusion 3 : le rapport Chahim réduirait encore les allocations gratuites d’un montant estimé à 1025 millions de quotas, par rapport à la proposition de la Commission.
Il y a deux raisons à l’origine de cette diminution supplémentaire :
- Le rapporteur Chahim propose une implémentation plus rapide du mécanisme d’ajustement du carbone aux frontières, et donc une suppression plus rapide des allocations gratuites pour les secteurs concernés. Cela réduirait le total des allocations gratuites de 850 millions de quotas au cours de la période 2021-2030 ;
- De plus, le rapporteur Chahim propose d’étendre le MACF à l’hydrogène, aux produits chimiques organiques de base, et aux secteurs des polymères. Cela réduirait encore le nombre des allocations gratuites de 175 millions de quotas.
Au niveau national, la réduction des niveaux d’allocation gratuite aurait principalement un impact sur les installations en Allemagne (-230 millions), suivie par la France (-106 millions), l’Espagne (-88 millions), l’Italie (-84 millions) et la Pologne (-80 millions).
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